Le dimanche 5 février 2017 au Palais 2 du Heysel à Bruxelles, des milliers de Congolaises et Congolais venus des quatre coins du monde se sont inclinés devant la dépouille d’Étienne Tshisekedi.
Une foule immense, une très longue file ininterrompue durant des heures, dans une atmosphère de profonde tristesse.
Que se passera-t-il alors le jour où le corps d’Étienne Tshisekedi touchera le sol de la RD Congo ?
Les milliers des Congolais et même des étrangers qui se sont déplacés le 5 février 2017 au Heysel à Bruxelles constituent un tout petit début de la réponse à cette question.
Dès quinze heures, soit une heure avant l'heure prévue pour l'hommage à l'illustre disparu, le flot des Congolaises et Congolais vers le lieu des funérailles a commencé.
Jusque 23 heures, heure prévue pour la fermeture de la très grande salle du Palais 2 Heysel, ce mouvement continuera, obligeant la police belge à placer des agents pour régler la circulation entre la sortie du métro Heysel, et le Palais 2.
Le pic sera atteint vers 16h30. Ceux qui arriveront sur les lieux à ce moment-là attendront au moins deux heures pour accéder au Palais 2 du Heysel, et au moins une heure à l'intérieur pour pouvoir enfin s'incliner devant le corps de l'icône de la politique congolaise.
Une grande tristesse et même un sentiment de révolte semblaient animer tous ceux qui avaient fait le déplacement.
À la grande question de savoir ce qui se passera à Kinshasa, le jour où le corps de Tshisekedi atterrira à l'aéroport de Ndjili avant de parcourir les 25 kilomètres qui séparent l'aéroport du centre de Kinshasa, une phrase captée au hasard des bribes de conversations sur le lieu du deuil, semble résumer ce qui arrivera : « Kake ekobeta », littéralement, « Il y aura coup de tonnerre, la foudre tombera ».
Oui, le corps d’Étienne Tshisekedi ramènera au pays la somme des frustrations de tout un peuple depuis au moins 1982, l'année où fut fondé le parti d’Étienne Tshisekedi, l'UDPS, Union pour la Démocratie et le Progrès Social.
Depuis cette année-là, le Peuple Congolais a-t-il accédé à la démocratie ? A-t-il accédé au progrès social ?
Par contre, depuis au moins cette année-là jusqu'à ce jour, que d'arrestations arbitraires, que d'injustices, que d'exécutions sommaires dans toutes les catégories socio-professionnelles : militants du parti, activistes de la société civile et des droits de l'homme, journalistes, anonymes…
Le sommet de la frustration aura été atteint avec le hold-up électoral de novembre 2011 où l'on priva au pays la possibilité d'être dirigé par celui que le peuple souverain avait plébiscité dans les urnes : Étienne Tshisekedi.
La période 2011-2016 aura été le summum de l'imposture.
Malgré cela, trente jours avant sa mort, Étienne Tshisekedi se fera violence en acceptant de laisser pour un an à la tête du pays, celui qui lui avait volé le pouvoir, pourvu qu'il y ait cohabitation kabiliste-opposition pour qu'enfin la démocratie puisse sortir gagnante en RD Congo.
Même cela, le clan actuellement au pouvoir le lui refusera !
Suprême mépris, l'actuel Premier ministre issu des accords du camp Tshatshi, diffuse plusieurs jours après le décès d’Étienne Tshisekedi un message de condoléances qui se termine par cette phrase assassine :
« Nous devons de même nous interdire toute politisation de cet événement malheureux »
Ainsi, les funérailles de Tshisekedi, ne peuvent même pas être considérées comme un grand rendez-vous politique entre le peuple souverain et celui en qui des dizaines de millions de personnes se sont reconnus ?
Le jour où le corps d’Étienne Tshisekedi touchera le sol congolais, il y aura une très grande communion dans une très forte douleur collective entre le symbole des aspirations profondes de plusieurs générations d'un Peuple longtemps meurtri, et ce peuple. Ce contact sera un véritable coup de tonnerre.
Il sied de réfléchir par deux fois à cette phrase d'un anonyme congolais aux funérailles d'Étienne Tshisekedi à Bruxelles: Le jour où le corps d’Étienne Tshisekedi touchera le sol congolais, « Kake ekobeta »
Bruxelles, le 6 février 2017
Cheik FITA